Lettre au sous préfet 02-97

Marseille, le 4 février 1997

 

Monsieur Thilo Firchow
Sous-préfet chargé de Mission  pour la Politique de la Ville

Monsieur le Sous-préfet,

 

Nous faisons appel à votre arbitrage sur le dossier d’investissement du local associatif  dénommé « le Petit Chaperon Rouge », situé 20 rue Colbert, en Centre Ville.
Vous l’avez compris ce dossier est soutenu par la communauté homosexuelle et nous sommes prêts à venir avec les dirigeants de l’association Marseille Arc-en-Ciel, porteuse de ce projet, vous exprimer les raisons de notre soutien.
La visibilité homosexuelle a été assez forte à Marseille de 1979 à 1987. De 1987 à 1993, les homosexuels sont  devenus invisibles, pulvérisés par le drame du SIDA. La disparition de la vie associative a aggravé les risques d’exposition des personnes au SIDA, en faisant disparaitre peu à peu la confiance des homosexuels en eux-mêmes, esssentielle à leur capacité de se protéger et à vivre la tête haute, malgré leur situation minoritaire.

Cette situation encore toute récente est grave pour les homosexuels marseillais en général, elle est particulièrement grave pour les catégories sociales les plus exposées aux brimades. Un lieu comme ce café associatif permettra aux associations de vivre au grand jour et de participer aux actions de sensibilisation en direction des homosexuels. Qui mieux que les homosexuels eux-mêmes peut agir en direction de ces publics?

Mais il est important aussi que la puissance publique apporte enfin à Marseille un réel soutien aux homosexuels qui ne l’ont que très faiblement sollicité au cours des années passées.
Le Contrat de Ville est particulièrement bien placé pour exprimer enfin ce soutien, à travers ses 3 partenaires publics que sont l’Etat, la Région et la Ville?
A notre connaissance du côté de l’Etat, deux positions contradictoires s’expriment. Tandis que la DDE souligne l’absence de priorité concernant les homosexuels dans l’action face au SIDA, dans le Contrat de Ville, ainsi que la dimension trop communautaire de ce projet. La DDASS souligne au contraire l’insuffisant affichage homosexuel par une association qui a manifesté une certaine volonté d’agir en faveur de la prévention du SIDA.

 

Face à ces deux positionnements nous vous demandons de soutenir simplement un projet qui exprime enfin une certaine capacité des homosexuels de s’organiser, un café associatif qui peut jouer un rôle actif dans l’animation de ce quartier du centre ville, une association qui n’a pas la prétention de se substituer à d’autres plus expérimentées qu’elle dans la lutte contre le SIDA, mais au contraire d’agir en complémentarité avec les acteur de la prévention.
Sur la scène démocratique, il nous parait essentiel que les homosexuels aient enfin, eux aussi, la possibilité de s’organiser et de s’exprimer. Il nous parait essentiel qu’ils soient clairement aidés pour cela.
Veuillez croire, monsieur le sous-préfet, à l’expression de nos sentiments respectueux.

Les présidents des associations
Marc Billoud, ACCGLM
Jean-Louis Loubaresse, David et Jonathan
Christian de Leusse, Mémoire des Sexualités