Les démarches auprès des anciens combattants 1999

Rencontre avec les associations anciens combattants, déportés et résistants

Maison du Combattant, 20 novembre 1999: compte rendu de l’entretien

Après de nombreuses démarches, nous sommes arrivés à obtenir un rendez-vous avec les associations organisatrices de la journée de la déportation du dernier dimanche d’avril.

Participaient à l’entretien:

– Pour les associations lesbiennes et homosexuelles: Pascal Marjou (Grues Libérées, mandaté par le CEL), Didier Rodde et un autre membre (Marseille Arc-en-Ciel), Eliane Gallan (CGL), Christian de Leusse (Mémoire des Sexualités)

– Pour les associations de combattants, résistants, déportés : le colonel Marcadet (président de l’UDAC), Igor Vassilieff (vice-président), Monsieur Cordelier ainsi que Madame Toros-Marter (Ass.des déportés d’Auschwitz).

Nous avons fait connaître notre solidarité avec les épreuves qu’ils ont vécu, et nous nous sommes efforcés de décrire les épreuves vécues par les homosexuels déportés (en particulier celles vécues par Pierre Seel qui était venu à Marseille voici quelques années ainsi et que Mme Toros-Marter se souvenait d’être venue écouter).

Nous avons souligné que si nous n’avions pas, comme eux, vécu une guerre ou une déportation, nous nous sentons très proche de nos ami(e)s déportés pendant la guerre du fait des répressions nazies.

Nous avons rappelé que nous participons depuis plusieurs années à la journée de la déportation du dernier dimanche d’avril, ce qu’ils savaient parfaitement.

Nous avons attiré leur attention sur plusieurs points qui nous tiennent à coeur en ce qui concerne cette cérémonie:

1- Nous n’apprécions pas que la police cherche à contrôler notre accès dans les barrières réservées au public (en particulier si nous arborons, avant d’y accéder, un triangle rose);

2- Nous souhaiterions pouvoir déposer une gerbe pendant la cérémonie, comme le font les enfants des écoles;

3- Nous demandons que la déportation des homosexuels soit citée dans un ou des discours officiels (nous avons signalé que nous avions apprécié cette année que Igor Vassilieff, aumônier, cite la déportation homosexuelle lors de l’absoute);

4- Nous ne comprenons pas pourquoi les fleurs que nous déposons individuellement, après la cérémonie officielle, sont systématiquement enlevées par les services de nettoiement, alors que les gerbes sont préservées;

5- Nous avons demandé que l’un de nos représentants puisse figurer parmi les personnalités officielles.

Nous avons été écoutés, mais plusieurs remarques nous ont été faites, entre autres:

– « Pourquoi ne manifestez-vous pas plutôt à l’occasion de la journée de l’antisémitisme et du racisme du 16 juillet qui paraîtrait plus adéquate pour votre cause ? »

– « Comment se fait-il que vous n’argumentiez pas davantage sur le nombre de déportés homosexuels, et que pour cela vous ne fassiez pas les recherches historiques qui permettent d’emporter davantage la reconnaissance de la société française à votre égard ? La première question de nos associations à l’égard des autres c’est « qu’est-ce que vous représentez ? »

– « En ce qui concerne les associations d’anciens combattants, il faut les interroger plus formellement, or il y a 3 fédérations qui doivent ensuite sensibiliser leurs associations (à l’UDAC, il y a 52 associations départementales…). Les 3 fédérations sont l’ADIRP, l’UNADIF et la FNDIR (la moins ouverte), elle sont co-organisatrices de la cérémonie ».

Il a été suggéré qu’après ces démarches, et si elles se révèlent positives, une lettre au préfet sera utile.

Pour conclure, j’attire votre attention sur le fait que lors de l’Université d’Eté Homosexuelle de juillet 1999, il a été proposé qu’une « journée du souvenir » homosexuel soit organisée la veille de la journée de la déportation.  Ch de Leusse

Christian de Leusse, Mémoire des Sexualités

Association Mémoire des Sexualités Marseille, le 6 décembre 1999

52 rue d’Aix, 13001 Marseille

tel/fax:04.91.91.46.86

Christian de Leusse

Président

Monsieur Tardivel FNDIR 8 rue Sainte, 13001 Marseille

Monsieur Gaidon ADIRP 4 rue de la République, 13001 Marseille

Monsieur Dreyfus URDIF 77 rue Grignan, 13007 Marseille

Monsieur le Président,

J’ai l’honneur de vous saisir d’une question qui nous tient à coeur, la question de la déportation des homosexuels et le désir que nous avons de continuer à participer dans la dignité à la cérémonie qui se déroule à Marseille tous les ans lors du dernier dimanche d’avril, dans le cadre de la Journée Nationale de la Déportation.

Lors d’un entretien récent avec des représentants de l’UDAC, à la Maison du Combattant, nous avons eu l’occasion d’expliquer pourquoi nous sommes solidaires de nos ami(e)s homosexuel(le)s qui ont vécu les horreurs de la déportation. Nous avons évoqué le nom de Pierre Seel – déporté à l’âge de 18 ans – qui a été officiellement  reconnu comme déporté voici quelques années.

Nous avons aussi expliqué notre tristesse pour la faible place qui nous était donnée lors de ces cérémonies.

En particulier, notre présence est à peine tolérée par la police, nous n’avons le droit de déposer des fleurs qu’après la cérémonie, et ces fleurs sont systématiquement enlevées après la cérémonie pour ne laisser place qu’aux gerbes officielles et aux bouquets de fleurs déposées par les enfants des écoles.

Nous avons cependant apprécié que, cette année 1999, pour la première fois la déportation des homosexuels ait été mentionnée lors de l’absoute.

Nous vous remercions de nous indiquer sur ces divers points votre sentiment.

Les homosexuels sont davantage reconnus dans notre société aujourd’hui, nous demandons aussi à être mieux reconnus à travers notre mémoire.

Nous souhaiterions en particulier que l’un de nos représentants puisse figurer, dans la plus grande dignité, parmi les personnalités officielles à l’occasion de cette cérémonie, marquant ainsi plus fortement la solidarité que nous avons les uns à l’égard des autres.

Cette dernière sollicitation vous parait-elle recevable? Seriez-vous disposés à nous appuyer en ce sens auprès des autorités publiques ?

Je me tiens à votre disposition pour venir vous rencontrer avec des représentants d’associations homosexuelles.

Veuillez croire, monsieur le président, à l’expression de mes sentiments respectueux.

Christian de Leusse