La Revue Masques
(d’après l’article d’Alain Sanzio co-fondateur de Masques et Persona,dans Entrevues, printemps 2023)
L’équipe fondatrice de la revue Masques est issue en 1979 du GLH-PQ (Groupe de libération homosexuel-Politique et quotidien) et de la commission homosexualité de la LCR (ligue communiste révolutionnaire).
Ce sont des militants du GLH-PQ qui donnent naissance au mensuel Le Gai Pied, avec Jean Le Bitoux, au trimestriel Masques avec Jean-Pierre Joecker, à la radio Fréquence Gaie et à la librairie Les Mots à la bouche, avec Jean-Pierre Meyer-Genton en 1981.
Hors de toute logique communautariste, Masques refuse l’assignation sociale imposée aux homosexuels et aux lesbiennes, sans hostilité au ghetto gai commercial des années 1970, le projet est de porter un regard gai sur le monde pour le questionner et le transformer.
Les piliers de la revue sont quatre personnes, très proches les unes des autres, le fondateur de la revue Jean-Pierre Joecker, son compagnon Alain Sanzio, Jean-Marie Combettes, Patrice Lorenzo, mais aussi Suzette Triton-Robichon et Nelly Mello, rencontrées au sein de la commission homosexualité de la LCR.
En 1981, les éditions Persona sont fondées par Jean-Pierre Joecker, Jean-Marie Combettes et Alain Sanzio.
Le contenu de la revue
Masques devient au fil des années davantage une revue culturelle dans laquelle la part prépondérante du vécu et de la militance du début a progressivement régressé, ainsi les pages culture passent de 38 pages à 76 pages du 1° au 4° numéro, et les pages sur le vécu gai seront autour de 15-20 pages sur 183 du n° 21 au n° 24.
Et les articles culturels exclusivement littéraires et cinéma du début vont évoluer vers d’autres champs, historiques et anthropologiques (Italie, sociétés amérindiennes, XVIIIè siècle), vers le théâtre (Chéreau, Genet) et la danse qui sont abordés du point de vue de l’actualité, vers la peinture (Michel-Ange, Pontorno, Marie Laurencin, Caballero), la photographie (Marie-France, Faucon).
La littérature a la première place, tous les livres abordant l’homosexualité sont chroniqués d’autant que les éditeurs envoient les nouveautés, ainsi de 10 pages dans le n°2, on passe à 29 dans le n°24, mais surtout de nombreux entretiens se font avec les auteurs, Jean-Paul Aron, James Baldwyn, Marie-Claire Blais, Pascal Bruckner, William Burroughs, Renaud Camus, Copi, Conrad Detrez, Françoise d’Eaubonne, Dominique Fernandez, Michel Foucault, Jocelyne François, Guy Hocquenghem, Christopher Isherwood, Bernard-Marie Koltès, Françoise Mallet-Joris, Kate Millet, Geneviève Pastre, Roger Peyrefitte, Manuel Puig, John Rechy, Catherine Rihoit, Angelo Rinaldi, François-Olivier Rousseau, Michel Tournier, Michel Tremblay, Gore Vidal. Avec certains d’entre eux les rencontres se prolongent dans la convivialité (Jocelyne François Dominique Fernandez, Conrad Detrez), la journée avec Michel Tournier restera dans les mémoires des animateurs de la revue, ainsi que les longs moments passés avec Michel Foucault, Roger Peyrefitte, la rencontre la plus émouvante se passe avec Marguerite Yourcenar à son hôtel de Pont Royal, dans sa résidence du Maine. La dernière rencontre avec Simone Veil est une belle surprise.