Jean-Pierre Meyer-Genton (7/11/1948 – 18/7/1996)
Par Walter Paluch.
Alain Sanzio ajoute son témoignage d’ami à celui de son compagnon Walter. J’ai rencontré Jean Pierre d’abord au GLH-PQ lors des AG hebdomadaires à Jussieu et nous avons rapidement sympathisé : nous c’est-à-dire outre Jean Pierre et moi, Jean Marie
Combettes, Jean Pierre Joecker, Roger et sa chienne Malice, Patrice Lorenzo et en 1977, le groupe habitait dans 2 « communautés » : Anvers et Blanche. Jean Pierre Meyer-Genton habitait celle de la rue Blanche, avec Jean Marie, Roger, Yves Catoire.
Peu à peu le désir de faire « quelque chose » de concret et pas seulement manifs et débats, s’imposa. Masques naquit en mai 79 et Les Mots à la bouche en 1980.
« J’ai rencontré Jean-Pierre en 1982 au Piano Zinc, bar mythique du Marais. Il venait de créer la librairie « Les Mots à la Bouche », moi j’étais professeur en Allemagne et devais rentrer trois jours plus tard. Pendant deux ans, à une époque où il n’y avait pas encore internet, la seule possibilité de communiquer était le téléphone ou le courrier.
Ou parcourir les 700 km qui nous séparaient en train ou en voiture. Après deux ans de ce régime difficile, j’ai quitté l’Allemagne et nous nous sommes installés ensemble à Paris. Notre relation allait durer jusqu’à sa mort prématurée à l’âge de 47 ans, d’un cancer généralisé et non du sida comme beaucoup de gens pensaient.
Dès son enfance, Jean-Pierre a deux passions : le livre et la peinture. Il veut devenir peintre mais se heurte au refus de son père de financer ce genre d’études et choisit finalement des études de droit. Cependant sa carrière juridique ne dure que 5 ans. Dans la puberté, grâce à ses lectures, il a découvert l’existence de l’homosexualité et sa propre attirance aux garçons.
Au début des années 1970, il débarque à Paris pour finir ses études. Il se rend à une soirée du FHAR mais ne s’y sent pas à l’aise. Son militantisme gay commence seulement quelques années plus tard, au sein de la mouvance plus politisée des GLH. C’est là qu’il développe l’idée de créer un lieu comme il en existe déjà dans le monde anglosaxon : une librairie spécialisée dans tout ce qui touche les homosexualités masculine et féminine et qui serait également un lieu de convivialité où l’on se retrouve autour d’un repas.
En 1980, il crée avec un autre militant, Yves Clerget, la librairie gaie et lesbienne « Les Mots à la bouche ». La gestion du restaurant s’avérant trop compliquée, Yves Clerget se retire de l’aventure après quelques mois et Jean-Pierre gère dorénavant, seul, la librairie qui tarde encore à prendre son envol.
Elle a acquis une certaine notoriété parmi les militants, notamment grâce aux rencontres avec des écrivains comme Yves Navarre et Dominique Fernandez pour leur prix
Goncourt, Jocelyne François pour son prix Femina, Conrad Detrez pour son prix Renaudot,
Herve Guibert à ses tout débuts…
C’est seulement à partir de 1983, avec le déménagement dans le Marais, que la librairie devient une institution incontournable de la culture LGBT française avec une renommée internationale. »