Constat diagnostic dressé à l’attention du Conseil Départemental des Bouches du Rhône
Le volet constat-diagnostic dressé par les associations
(octobre 2017)
Nos associations sont une source importante d’information, sur leur action et leur objectif
Mais aussi, grâce à leur pratique sur ce que sont les discriminations aujourd’hui
Les associations nationales ou locales qui réalisent un rapport d’activité sont ici nos sources :
Défenseur des Droits : https://www.defenseurdesdroits.fr/sites/default/files/atoms/files/836170010_lgbt_access.pdf
SOS homophobie : https://www.sos-homophobie.org/rapport-annuel-2017
AIDES : http://www.aides.org/publication/rapport-dactivite-et-bilan-financier-2016
Le Refuge : https://www.le-refuge.org/telechargments/documents/category/rapports-d-activites.html
L’Autre Cercle : Livre blanc 2014 http://www.autrecerckle.org/page/livre-bklanc-2014 Diversité et travail http://www.autrecercle.org/page/diversite-et-travail-n-a-t-on-rien-oublie
Trans : https://www.t-time.net/presentation-2/ https://www.t-time.net/ressources/
Sports : http://sports.gouv.fr/prevention/incivilites-violences/CoupdeSifflet/Coup-de-Sifflet-contre-l-homophobie-dans-le-sport/article/Chiffres-cles-de-l-homophobie-dans-le-sport
http://sports.gouv.fr/prevention/incivilites-violences/CoupdeSifflet/Coup-de-Sifflet-contre-l-homophobie-dans-le-sport/
http://federation-lgbt.org/fichierUploader/RapportHomophobieAquitaine.pdf
http://www.ffbad.org/data/Files/Espaces_Dedies/CharteHomoSport.pdf
https://corpsetculture.revues.org/823
Les discriminations peuvent être abordées à partir des différents publics (les femmes, les personnes trans et intersexes, les gays, les personnes LGBT précarisées, etc.).
Dans un certain nombre de cas il y a un vrai besoin de spécifier les publics concernés, la santé par exemple exige des approches différenciées.
Dans d’autres cas, les services concernés par l’accueil de ces publics quels qu’ils soient doivent être particulièrement sensibilisés.
Ces questions peuvent être abordées en fonction des grandes thématiques, c’est ce que nous retenons ici afin de mieux identifier à chaque fois les institutions publiques concernées.
SOS homophobie a recueilli 1575 témoignages d’actes LGBTphobes en 2016, soit une assez nette augmentation par rapport à 2015. Et 2013 a été l’année « terrible », avec 3517 témoignages qui ont mis en évidence que la visibilité plus forte des homosexuels avec la « conquête » du mariage pour tous a eu son revers de médaille, un ciblage plus aisé par les homophobes de toutes espèces. (Plus de 20 témoignages de LGBTphobie ont été reçus en 2016 émanant des BDR)
Ces témoignages concernent (par ordre d’importance quantitative) : des manifestations de rejet, des insultes, des discriminations, des menaces et du chantage, des agressions physiques, du harcèlement, de la diffamation, des outing, des dégradations de biens, des agressions sexuelles, voire des licenciements
A l’égard des lesbiennes, les manifestations de rejet, les discriminations et les menaces et chantages sont plus fortes
A l’égard des personnes trans, les manifestations de rejet sont plus fortes encore, les discriminations sont élevées et les agressions physiques sont plus nombreuses
Accueil dans les services publics :
L’accueil en général est une question importante pour les LGBTI+. Il n’est pas nécessaire d’être trans, intersexe ou queer pour demander la fin de la binarité « monsieur/madame » dans
les services publics, que ce soit à l’oral ou à l’écrit, à travers les formulaires administratifs qui veulent absolument des « cases » à cocher.
Il ne faut plus contraindre les personnes à se définir en fonction de règles administratives ou de normes sociales. Et les prénoms que les personnes se choisissent doivent être respectés.
(Deux guides La Chrysalide existent sur La transphobie et les discriminations le n°4 et Les personnes intersexuées/intersexes le n°1. Et OUTrans propose des formations diverses à l’accueil des personnes trans et des sensibilisations sur les transidentités)
Les personnes trans et intersexes sont particulièrement soumises à des décisions arbitraires de la part des services d’état-civil. Les comportements des services sont souvent humiliants. La peur du comportement transphobe d’un service des services sociaux amène les personnes concernées à limiter leurs recours à ces services, alors qu’elles y ont droit. De ce fait les personnes trans vivent longtemps, malgré elles, la différence entre l’identité de genre affichée et l’identité de genre administrativement reconnue.
Selon l’enquête faite en 2013 par Karine Espineira et Arnaud Alessandrin, 44,5% des répondants déclarent avoir subi des propos transphobes de la part des administrations publiques.
Adolescence, scolarité :
La famille et l’entourage proche (15% des témoignages auprès de SOS homophobie) est autant que l’espace public (16%) un contexte de discrimination, le voisinage en rajoute une couche (6%), rendant parfois pour les adolescents le lieu de son intimité invivable.
Le milieu scolaire et étudiant (5% des témoignages) et l’importance prise par internet (22,5%) accroit encore leur insécurité, en traquant leur manière de vivre ou leurs écarts de propos.
Compte tenu du fait que les appelants ne révèlent pas facilement leur âge, on peut estimer que les moins de 24 ans représentent entre 16 et 31% des témoignages.
Les jeunes filles et les jeunes trans représentent 28% des appels.
Dans cet entourage proche, les manifestations de LGBTphobies pour l’adolescent sont : le rejet et l’ignorance, les insultes, la discrimination, les menaces et le chantage, le harcèlement, les agressions physiques ou sexuelles, la diffamation ou même le outing
Les attitudes de rejet des parents et les insultes entre adolescents sont des facteurs forts de déstabilisation.
Les milieux marqués par la pratique religieuse exercent parfois un contrôle étouffant sur leurs enfants.
Le Refuge souligne les conséquences des maltraitances familiales sur l’isolement, l’errance, les dépendances (toxicomanies, alcoolisme), les prises de risques (VIH, IST), les processus d’autodestruction ou le recours à la prostitution de survie. Le suicide peut s’ensuivre, avec une forte prévalence chez les jeunes LGBT.
Le suivi psychologique de ces jeunes se confronte au déni des difficultés qu’ils rencontrent, à l’angoisse de se dévoiler ou à la peur d’aller plus mal s’ils parlent de leurs problèmes.
Les enfants et les adolescents doivent être accompagnés dans leur autodétermination, cet accompagnement est encore plus nécessaire pour les personnes trans et intersexes.
Travail :
Le lieu de travail représente 12% des appels à SOS homophobie.
Sur la base de 194 témoignages reçus au niveau national, on constate que les manifestations de discrimination sont semblables à ce qui se passe ailleurs (rejet, insultes, discriminations, harcèlement, diffamation, outing, menaces chantages, agressions physiques, et il s’y ajoute les licenciements dans 9% des cas)
En ce qui concerne les fonctionnaires, le baromètre Défenseur des droits/OIT de 2012 indique que 51% des agent.e.s de la fonction publique estiment que « révéler son homosexualité à son entourage professionnel contribue à mettre mal à l’aise des collègues de travail ».
De plus, la différence de salaires est comparable dans le privé comme dans le public pour les gays par rapport aux hommes hétérosexuels : dans le privé, les salaires sont de 6,3% moins élevés dans le privé, 5,6% moins élevés dans le public (le guide du Défenseur des Droits cite là un article de Economie et Statistique de 2013).
L’Autre Cercle souligne que 1 à 2 millions de salariés se cachent, en effet 43% des salarié.e.s pensent encore difficile d’aborder sa situation personnelle concernant l’orientation sexuelle dans l’entreprise. Les lesbiennes sont confrontées à une double discrimination (femme et homosexuelle), la moitié des sondées déclarent avoir fait l’objet d’au moins une des deux discriminations, et 22% subissent la double discrimination sexisme+homophobie. Elles sont 2/3 des sondées à cacher leur orientation sexuelle au travail, contre la moitié seulement pour la population LGBT sondée globale.
Certains collègues de travail peuvent entretenir un climat pesant, difficile à vivre dans un contexte confiné et contraint. Les LGBT sont souvent contraints au silence sur leur vie privée, au risque que ce soit perçu comme un aveu. Menaces, chantage et diffamation sont parfois un jeu pour les collègues de travail.
La hiérarchie est peu attentive à ces types de harcèlements et dans certains cas n’hésitent pas à l’alimenter (prenant alors prétexte du climat délétère créé par ces situations pour licencier la personne agressée plutôt que l’agresseur)
Les syndicats sont peu attentifs à ces questions en milieu professionnel.
L’accès à l’emploi est souvent plus problématique pour les personnes LGBT.
L’Autre Cercle note une étude de 2013-2014 selon laquelle près d’un.e salarié.e sur 5 s’est vu refuser un emploi en raison de son orientation sexuelle ou de son identité de genre. Selon cette même étude 22,9% se son vus refuser une évolution professionnelle, 13% disent avoir été licencié.e.s et 5,5% poussé.e.s à la démission.
AIDES énumère un certain nombre de métiers prétendument interdits d’accès aux personnes concernées par le VIH, y compris dans l’armée.
Selon l’enquête de Karine Espineira et Arnaud Alessandrin en 2013, pour les personnes trans 1/3 des actes transphobes qu’elles subissent se déroulent sur le lieu de travail, qui est ainsi un lieu confiné où elles sont particulièrement vulnérables.
La perte du travail pour des raisons de LGBTphobie, et particulièrement de transphobie, est dommageable pour les réseaux relationnels qui s’étaient déjà peu ou prou construits sur le lieu de travail, pour la santé mentale et pour l’estime de soi (yc à travers des tendances suicidaires).
Social :
SOS homophobie a au à connaitre 87 cas de comportements malveillants de la part du voisinage en 2016, auxquels les conditions d’habitat permettent rarement d’y échapper. Les voisins s’en donnent alors à coeur joie pour cancaner, colporter des propos malveillants et insulter, à quoi s’ajoute selon les cas des menaces directes, du harcèlement, de la diffamation voire des dégradations de biens ou des vols destinés à faire mal aux personnes ciblées.
AIDES souligne les discriminations qui se manifestent à l’égard des personnes séropositives, 43,6% de ces discriminations en 2016 émanent des relations familiales et amicales et 49,1% de relations sexuelles, au point que les personnes séropositives (même si leur charge virale est à 75% indétectable) s’auto-excluent de toute vie sentimentale. La LGBTphobie qui se manifeste autour des personnes concernées par le VIH accroit leurs difficultés.
Les personnes trans et intersexes migrantes, en milieu carcéral ou en situation de prostitution doivent être reconnues pour leur extrême fragilité.
Police :
A priori la police est bien placée pour recevoir les plaintes et les collecter. Pour la 1ère fois le ministère de l’Intérieur vient de diffuser des statistiques (bilan 2016 dans Interstat Info rapide n°7 septembre 2017) indiquant pour le niveau national 1084 infractions commises sur l’orientation sexuelle réelle ou supposée ou de l’identité de genre (1020 victimes). Mais ce n’est qu’indicatif compte tenu des hésitations très fréquentes à déposer plaintes, de l’insuffisante sensibilisation des policiers et de l’absence d’implication de la Justice.
Pour autant, l’injure et l’outrage représente 1/3 des infractions constatées (suivies en termes quantitatif par les violences et des menaces). Les 15-24 ans sont les plus ciblés (30% des infractions) et en particulier dans les grandes agglomérations (52% des infractions).
(Une quarantaine de victimes se sont fait connaître dans les BDR en 2016.)
Selon l’enquête faite en 2013 par Karine Espineira et Arnaud Alessandrin, 96% des personnes trans ayant subi des comportements transphobes n’ont pas porté plainte.
Santé :
SOS homophobie, sur la base de 23 témoignages en 2016 au niveau national, souligne que des discriminations se manifestent dans ce domaine, ainsi que du rejet, des insultes, des menaces et du chantage, du harcèlement, et même du outing. Cela se manifeste par les préjugés et la LGBTphobie de certains médecins, et plus largement par les limites imposées à l’autoconservation des gamètes, celles imposées au don du sang.
AIDES met en place des opérations de testing qui mettent en évidence les multiples refus de soins, en particulier auprès des cabinets dentaires et des services gynécologiques, sous prétexte de VIH. L’association s’alarme des obstacles mis à l’accès au traitement contre le virus de l’hépatite C au nom de son coût très élevé.
En ce qui concerne la sexualité et la santé sexuelle des mineur.e.s AIDES souligne la fréquence avec laquelle le secret médical n’est pas préservé.
AIDES a réalisé dans les BDR 19 526 contacts en 2015, dont 13 749 ont concerné des hommes, 5 441 des femmes et 336 des trans. AIDES agit pour le dépistage et les actions de réduction des risques, en ciblant les divers publics hommes ayant des relations avec d’autres hommes, personnes migrantes et/ou d’origine étrangère, personnes vivant avec le VIH et/ou les hépatites, consommateurs-trices de produits psychoactifs, femmes, détenu-es, travailleuses-rs du sexe, ou encore personnes trans. L’action porte sur l’aide aux personnes, sur leur capacité à se prendre en charge, sur leur capacité à se protéger (et se défendre) face aux discriminations, la coordination des réseaux de santé et sur la sensibilisation du public plus généralement à l’égard des discriminations.
Trop de médecins sont encore incultes en matière LGBT ou ne sont pas respectueux des lesbiennes qu’ils (ou elles) leur faisant comprendre qu’elles ne sont pas « dans la norme ».
En ce qui concerne les personnes trans et intersexes, les discriminations sont particulièrement importantes compte tenu de la persistance de la « médicalisation » de la transidentité (psychiatrisation) et du rôle donné au corps médical pour intervenir sous prétexte de mettre en accord le corps et l’état-civil (atteinte à l’intégrité physique par mutilation, stérilisation, traitement hormonaux non consentis) avec des décisions des médecins (plus ou moins en accord avec les parents) pour assigner un sexe aux enfants intersexués.
Une enquête de La Chrysalide en 2011 a révélé que 16% des personnes trans se sont vues refuser des soins du fait de leur transidentité. Ce qui a conduit 35% d’entre elles à renoncer à des soins de peur de préjugés ou de discriminations émanant du corps médical.
Des équipes médicales « officielles » se considèrent comme autorisées à décidées à la place des personnes concernées. Les personnes trans et intersexes veulent avoir le libre choix de leur parcours médical. (Et elles sont parfois mieux placées pour expliquer au personnel médical
comment rédiger les ordonnances. Le personnel médical n’a pas à poser des questions inadéquates sur les raisons d’une consultation. Un guide La Chrysalide existe destiné aux professionnels de santé le n°5 Santé Trans 2011).
Espace public :
Les témoignages auprès de SOS homophobie concernent pour 14% des lieux publics, mais on peut sans doute ajouter à cela les actes homophobes vécus dans les commerces et les services (5,5%) qui sont – peu ou prou – des excroissances de l’espace public.
Ces lieux publics sont les rues, les parcs et les transports en commun, où les harcèlements à l’égard des LGBT rejoignent la question du harcèlement à l’égard des femmes en général ; ce sont aussi les lieux plus spécifiques (lieux de drague) fréquentés par les homosexuels masculins, facilement cibles d’actes violents.
Selon l’enquête de Karine Espineira et Arnaud Alessandrin en 2013, pour les personnes trans c’est la rue qui est le lieu le plus fréquent des actes transphobes, à 50,77%
Selon les chiffres nationaux de la police 1/3 des infractions anti LGBT sont commises sur la voie publique et comme il est dit ci-dessus, l’injure et l’outrage représente 1/3 des infractions constatées (suivies en termes quantitatif par les violences et des menaces). Les 15-24 ans sont les plus ciblés (30% des infractions) et en particulier dans les grandes agglomérations (52% des infractions)
Internet devient un espace public où se déroulent bien des dérapages verbaux et écrits à l’égard des LGBT, avec une tendance particulière à cibler les personnes trans.
Sport :
Selon Paris Foot Gay, 41% des joueurs professionnels et 50% des joueurs en centre de formation ont exprimé une opinion hostile à l’homosexualité ; pour 63% des joueurs professionnels et 74% des jeunes joueurs, l’homosexualité est un tabou
La DRJSCS Aquitaine en 2011 dénonce « un climat véritablement homophobe »: 50,6% des sportifs hommes ont déclaré une attitude négative ou ambigüe envers les gays ; plus les hommes s’identifient comme sportifs plus ils sont homophobes
Selon l’observatoire des incivilités de la FF de basket-ball en 2014-2015 : 21 actes à caractère homophobe, à l’encontre d’arbitres (12), de joueurs (6), autres (3)
Révéler son homosexualité dans le sport c’est risquer de subir des comportements homophobes. La taire c’est se hasarder à n’être jamais reconnu comme tel et vivre dans une clandestinité couteuse au plan social, psychologique et culturel, ou être cible de malveillances.
Une Charte contre l’homophobie dans le sport a été établie destinée à reconnaitre l’homophobie comme discrimination et la sanctionner, promouvoir la diversité et apporter une aide aux personnes harcelées, recenser les actes homophobes et mettre en place des modules éducatifs
Dans tous ces domaines, les situations sont amplifiées lorsque les raisons de discriminer se cumulent. Etre LGBTI+ et handicapé, LGBTI+ et « racisé », LGBTI+ et immigré, LGBTI+ et détenu, LGBTI+ et précarisé, LGBTI+ et pratique religieuse, LGBTI+ et VIH, etc. ce sont autant de situations de plus grande vulnérabilité.
Et parmi les LGBTI+, les personnes trans et intersexes sont particulièrement exposées à ses discriminations, s’ils-elles cumulent plusieurs de ces handicaps et s’ils-elles sont en période de construction ou de reconstruction de leur propre personnalité. Ces discriminations croisées doivent faire l’objet d’une attention redoublée.