Danièle Cottereau, pionnière des ondes lesbiennes
Tom Umbdenstock Têtu 2023
Militante lesbienne et féministe, animatrice de la première heure sur Fréquence Gaie (devenue Radio FG), mais aussi peintre et musicienne engagée, Danièle Cottereau fait le récit à têtu· de ses années rebelles.
À la gare d’Aulnay-Sous-Bois, Danièle, 74 ans, nous attend. Sa veste blanche la distingue de la foule. Comme sa voix de fumeuse invétérée, et son air provoc’ post soixante-huitard lorsqu’elle hurle “ta gueule” au chien qui beugle derrière une grille dans ce quartier pavillonnaire où nous la suivons jusqu’à chez elle ; une maison où elle habite seule depuis quinze ans.
Danièle est née Paris, dans le 17e arrondissement, d’un père prof de français et d’histoire-géo, et d’une mère secrétaire dans les ministères. Sa jeunesse se passe entre Saint-Ouen, proche banlieue nord de la capitale ; le XIXe arrondissement, porte de
Pantin, où elle grandit ; le lycée Bergson, où elle étudie ; et les buttes Chaumont, où elle passe le reste du temps. À ses camarades de classe, elle dira “je sais que ne me marierai pas”. À l’époque, le mariage pour tous est en effet loin d’être d’actualité.
Un réseau de copines lesbiennes
“À cinq ans, j’étais amoureuse de l’institutrice, nous confie Danièle Cottereau. Même si à cet âge, tu ne te dis pas que tu es lesbienne, évidemment. Et puis à huit ans, j’ai été amoureuse de la fille du boucher. À quinze ans, j’étais amoureuse d’une autre fille, et à dix-huit, d’une autre encore.” Pas la peine de faire de coming out auprès de sa mère, qui tombe sur une carte postale arrivée tout droit du Brésil, dans laquelle une certaine Natacha lui écrit qu’elle l’aime et l’embrasse. Du côté paternel : “On ne parlait pas au père de ce genre de choses à l’époque.” Etait-ce difficile d’être une adolescente lesbienne dans les années 1960 ? “Je ne me suis pas rendu compte tout de suite de la difficulté que ce serait.”
À Paris, dans sa jeunesse, “il n’y avait pas un ‘milieu’, comme chez les garçons ». « On avait un réseau de copines”, explique Danièle Cottereau. Quelques endroits où se retrouver existent toutefois, comme le bar La Champmeslé, ou Le Katmandou, “une boîte de femmes rue du Vieux-Colombier”. “Quand j’avais fini de bosser [au théâtre Le Lucernaire, où elle travaillait à l’époque], j’allais y boire un verre, seule ou avec des copines.”